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Mise à jour le : 15/07/2024
Au sein de l’université de Bordeaux, le service PHASE accompagne les étudiantes et étudiants ayant des besoins spécifiques, qu'il s'agisse d'une situation de handicap, de la pratique d'un sport à haut niveau, d’un travail salarié parallèle aux études ou encore d’une charge de famille. Julie Cornaton est affectée à ces profils au sein de la faculté de STAPS, auxquels elle essaie d’apporter une aide sur mesure.
Julie Cornaton est une sportive. Elle a toujours pratiqué, depuis l’enfance, encouragée par ses parents, et s’est ensuite tournée vers les sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS) lors de ses études à Lyon, qu’elle a parachevées avec une thèse en histoire du sport à l’université de Lausanne. Ses recherches portaient sur l’évolution, de 1954 à 1968, des mouvements de sport pour personnes handicapées physiques - « de la rééducation-réadaptation à la compétition ». Elle s’est aussi penchée sur les violences sexistes et sexuelles commises dans le milieu sportif, ainsi que sur l’homophobie, un intérêt qu’elle explique ainsi : « On dit toujours que le sport c’est sain, c’est positif, mais certaines personnes restent à la marge de ces pratiques, plus vulnérables que les autres, voire rejetées, et c’est à elles que je m’intéresse ; celles qui poussent le milieu sportif à se remettre en question. »
Julie est pourtant arrivée « très naïve » dans le milieu du sport, mais des enseignants l’ont ensuite initiée à la sociologie, pour laquelle elle s’est passionnée, et qui l’a notamment éclairée sur le sort de ces publics dits vulnérables. Si elle a constaté une amélioration de leur inclusion ces dernières années, il reste du chemin à parcourir pour que les valides soient moins discriminants : « Après une longue invisibilité, la médiatisation des sportifs paralympiques est passée par une imagerie de super-héros, qui s’est avérée une bonne stratégie pour toucher le grand public, mais dont le revers est d’effacer leur quotidien parfois difficile, moins glamour. » À l’université de Bordeaux, elle a trouvé une mission parfaite pour utiliser sa sensibilité et ses compétences en faveur de centaines de personnes chaque année. Le service Phase auquel elle appartient est un service transverse qui propose un accompagnement sur mesure aux étudiantes et étudiants ayant un profil spécifique : en situation de handicap, sportifs de haut niveau, salariés, entrepreneurs ou artistes, mais aussi étudiants engagés, élus, personnes chargées de famille ou enceintes, ou encore suivant un double cursus.
Ces situations concernent environ 2300 étudiantes et étudiants par an. Julie est affectée à la faculté de STAPS, aidée chaque année d’un ou deux emplois étudiants, comme chacun de ses sept collègues chargés d’autres sites, également soutenus par une responsable de service et une chargée de gestion administrative. Son travail ne connaît pas la routine et alterne des périodes de marathon et de sprint : « la rentrée, on la sent bien passer ! », euphémise-t-elle, en pensant à tout ce qu’elle devra mettre en place en septembre pour accompagner les nouveaux arrivants à l’université. Une première tâche consiste à analyser les situations pour déterminer quels sont les étudiants éligibles à cet accompagnement - les handicaps « invisibles » étant également pris en compte. Puis vient la mise en place d’une multitude d’actions propres à favoriser la réussite pendant les études, avec la complicité indispensable des enseignantes et des enseignants.
Julie prend l’exemple d’un étudiant en première année de STAPS et en situation de handicap : « c’est un jeune homme en fauteuil roulant qui a également du mal à se servir de ses mains, donc on va embaucher un ou deux étudiants dans sa promotion qui vont prendre des notes dont il pourra bénéficier. Ensuite, pour sa pratique sportive, nous allons mettre à sa disposition un fauteuil de sport et aménager cette pratique ainsi que son évaluation. Enfin, nous allons aménager ses examens, qu’il va passer avec une majoration de temps - on parle d’un « tiers temps » - et un secrétaire d’épreuve chargé de l’aider à composer, ainsi qu’un ordinateur qui lui est fourni par l’université. D’autres étudiants, mal-entendants ou mal-voyants, seront accompagnés d’un traducteur en langue des signes ou dotés de documents traduits en braille. Il s’agit d’un véritable travail d’équipe avec les enseignants », souligne Julie. Les chargés d’accompagnement du service PHASE bataillent également pour accroître l’accessibilité des bâtiments de l’université. Certains accès, bien qu’aux normes, s’avèrent encore très compliqués pour des personnes porteuses de handicap.
Dans une moindre mesure, Julie s’occupe également des artistes confirmés qui passent en début d’année devant une commission d’experts, internes et extérieurs à l’université, pour valider leur statut. « Au sein de STAPS, nous avons en particulier des danseurs de breaking, une discipline entre l’artistique et le sportif, présente pour la première fois aux JO cette année ! » Certains étudiants de l’université se sont d’ailleurs entraînés, ces derniers mois, en perspective des jeux olympiques. Et pour l’anecdote, parmi d’autres parcours exceptionnels, on peut citer un sportif célèbre que l’université de Bordeaux a l’honneur d’accueillir dans son IUT de gestion des entreprises et des administrations : le rugbyman Louis Bielle-Biarrey, star de l’Union Bordeaux-Bègles (UBB) et plus jeune joueur de l'histoire du XV de France sélectionné pour une Coupe du monde.
« Les sportifs de haut niveau peuvent bénéficier d’un étalement de leurs études, pour pouvoir suivre leur entraînement et participer aux compétitions le plus sereinement possible. » Les chargés d’accompagnement doivent jongler pour eux avec les UE (unités d’enseignement) et les examens, afin de leur proposer un calendrier ad hoc tenant compte de leurs obligations. Mais les sportifs de « très bon niveau » sont traités à la même enseigne par l’université de Bordeaux : « Ils ont, eux aussi, de très fortes contraintes, avec beaucoup d’entraînements, il serait injuste de les pénaliser », constate Julie. Tandis que les sportifs de haut niveau sont reconnus par une liste ministérielle, ceux auxquels est reconnu un « bon » ou un « très bon niveau » passent, comme les artistes, devant une commission universitaire spécifique.
C’est toute la diversité de la société que Julie voit défiler dans son bureau, des étudiants obligés de travailler pour subvenir à leurs besoins ou accaparés par une entreprise qu’ils ont lancée en parallèle de leurs études, des jeunes parents épuisés, des bûcheurs multi-diplômés, des personnes fragiles, entravées, courageuses, déterminées… Parmi les étudiantes et étudiants qu’elle accompagne, Julie estime qu’il n’y a pas de profil plus important qu’un autre : « c’est la ligne de conduite du service PHASE », et le message qu’elle veut faire passer à celles et ceux qui n’oseraient pas pousser sa porte, de peur de déranger. « On essaie d’être aussi visibles que possible, notamment lors des réunions de rentrée. Et j’espère que l’info circule aussi en amont, dans l’enseignement secondaire, pour que les nouveaux bacheliers à besoins spécifiques sachent qu’ils ont toute leur place à l’université de Bordeaux. »
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